Maurice PINSSON(né en ?) : premier épisode déguisé en introduction.

 

Maurice Pinsson est une vieille figure encore jeune de l'orgue dans les Ardennes. Les quelques "joueux dèz orgues" qui mugissent présentement dans nos campagnes ardennaises sont presque tous issus de sa classe du Conservatoire de Charleville : Pascale Rouet, Béatrice Bélert, Claude-Alain Chenot, Jean-Philippe Gélu … pour ne citer que les plus célèbres.

Après ses humanités à l'Institution Saint Remy où il effectue quelques balbutiements organistiques, les choses sérieuses commencent à Reims avec des études de musicologie, d'harmonie et d'orgue, avec notamment cette grande figure rémoise de l'orgue monumental "cathédralesque" : Arsène Muzerelle, et Georges Moineau, professeur d'harmonie, de musique de chambre, et compositeur. Là, il se fond dans le moule de la grande École André Marchal, célèbre titulaire de Saint-Eustache et de Saint-Germain des Prés à Paris, dont Arsène Muzerelle lui-même, Gaston Litaize, Jean Langlais, Jean d'Albi et bien d'autres seront les illustres disciples. Maurice Pinsson sera un des derniers élèves du Maître André Marchal à son domicile de la rue Duroc à Paris, et ce pendant quelques années.

Il est curieux de constater que la nouvelle génération récemment sortie du Conservatoire de Charleville, Christophe Marchand, Willy Ippolito et Sébastien Cochard notamment, étaient eux-mêmes élèves de Pascale Rouet. D'André Marchal, qui remplaçait Louis Vierne à Notre-Dame de Paris en 1914, à Willy Ippolito, jeune ardennais de 21 ans plein d'avenir, il y a 5 générations d'organistes ! Bien sûr, la manière est différente avec chacun, le style évolue avec les "redécouvertes" musicologiques ou la facture instrumentale… mais la grande tradition de l'École Française de l'Orgue (cocorico !) se perpétue à travers les âges, vivante, colorée, inventive, bien différente du dogmatisme sévère et rigide que l'on peut encore trouver par ailleurs dans le monde de l'orgue.

Maurice Pinsson, costume trois pièces et cravate impeccables, un des maillons de cette grande chaîne organistique, est aussi un des titulaires de l'orgue de Mouzon, reconstruit par Barthélémy Formentelli, jeans et blouse bleue, lequel a lui aussi bien connu André Marchal, élégance parisienne et montre sonore à gousset, alors qu'il exerçait ses talents fougueux d'arpète passionné chez Victor Gonzalès… la boucle est bouclée. Facteurs d'orgues et organistes, dans une estime mutuelle dûment sublimée en osmose féconde, recréent pour nous les trésors musicaux du passé.

Merci à Maurice pour tous les concerts donnés bénévolement à Mouzon depuis 1974, et en particulier pour celui du 18 juillet 1993 dédié à la mémoire d'André Marchal, lequel inaugurait 20 ans auparavant le premier renouveau de notre instrument. Merci de perpétuer cette interprétation où rigueur et brin de fantaisie poétique se marient si bien ! Et ce pendant longtemps encore, dans le troisième millénaire naissant, car, comme chacun sait, "le futur ne manque pas d'avenir". (à suivre)

 

Deuxième épisode (mars 2001) :

Son concert du 22 septembre 2000 fut un sommet de plénitude architecturale : entre le prélude et la fugue (ut majeur, le grand ; sol majeur), un adagio des sonates V et VI en trio. Le grand mi mineur, le choral de Leipzig "Nun komm" et la toccata dorienne en clé de voûte. Quel programme à tenir sur un orgue classique français ! Mais le style rappelle bien toujours le naturel et la poésie de son Maître André Marchal... (à suivre)

 

Troisième épisode (mars 2004) :

Maurice possède depuis quelques mois un magnifique orgue Rudi Jacques inspiré d'un Kabinettorgel Ludvick de Backer de Middelburg (1750) qui se trouve au musée du "Vleeshuis" à Anvers. Il compte 5 jeux : Montre 8' (à partir du 2e ut), Bourdon 8', Flûte 4' (à cheminée), Doublette, place pour Nasard ou Quinte. L'instrument dut opérer une lévitation très périlleuse en passant par la fenêtre du premier étage. Enfin tout s'est bien passé, et nous attendons impatiemment son inauguration (arrosée bien sûr) ! (à suivre)

 

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